Du Port des Armes
Il s’agit, Mesdames et Messieurs les jurés, du port des armes en général et de l’utilisation du fourreau en particulier.
S’il est un plaisir - psychanalitiquement explicable - qui nous envahie tous et toutes, depuis de jeunes fougueux jusqu’au gérontes arthritiques et souffreteux, lorsqu’ils participent à une manifestation à tendance aventureuse, c’est bien celui de pouvoir porter une arme, aussi latexeuse soit elle.
Je passerai sur les détails tels que refoulement inhibé de désir de violence, transgression d’interdit social, etc... Mais le fait est que porter une arme permet à un joueur de GN de poser son personnage comme quelqu’un capable de se défendre et qui va pas se laisser emmerder par de vils manants aux regards torves et peu amènes voulant honteusement dérober les quelques pécunes qu’il a mis un temps fou à amasser en servant loyalement le Duc de Locklen, ce vieux rapiat, et en sacrifiant à Mushroom, Dieu de la parcimonie et des bonnes affaires (Aujourd’hui la bolée de cidre à 10 deniers et exceptionnellement 20 deniers les 2 !). Ah mais.
Et en plus ça fait médiéval (si, si dans Robin des Bois, j’y ai vu, ch’t’assures, y portent tous un rasoir au côté).
Pourtant l’histoire médiévale et les faits matériels impliquent -plac- que les détenteurs d’armes soient un brin au courant des us et coutumes de leurs semblables.
Tout d’abord, toute arme peut être portée de plusieurs façons, chacune ayant une signification précise dans le code implicite du monde médiéval. L’arme est usuellement portée dans un fourreau, outil indispensable s’il en est. Ainsi l’arme dénote soit d’une profession (garde, milicien, typographe...) soit d’un rang de noblesse (le manant et le vulgaire n’ont pas le droit de porter les armes dans la rue sous peine de se faire lécher entre les doigts de pieds jusqu’à ce que mort s’ensuive).
L’arme au fourreau implique que son propriétaire est un être raisonnable, censé, actuellement calme et non belliqueux. Pour fabriquer un fourrel, les plus rustres se contenterons d’un anneau de rideau qui leur permettra de passer l’arme à leur ceinture. D’aucuns pourront préférer un fourreau cousu de cuir à armature de bois ou de fibre de verre (sans armature, un manchot hydrocéphale dégainerait plus vite que vous) ou même carrément forgé dans la tôle, fourré à la moquette pour préserver la lame. Bref, cette manière de porter une arme est la seule acceptable pour éviter les conflits inopinés.
Il peut également être normal de voir des sales types porter une arme hors du fourrel. Cela implique forcément des choses. Soit il la porte par la lame ou par un bout peu commun, ou dans une position inhabituelle (sur l’épaule, etc...) : c’est que l’arme est endommagée et ne peut servir. Il ne viendrait pas à une personne ayant un tant soit plus de cervelle qu’un élu du Front National de tenir une épée par la lame et qui plus est sur l’épaule avec un autre but que de l’emmener chez le forgeron.
Alors là, OK, ça va pour cette fois. Mais que je vous y reprenne pas...
Sinon, l’arme peut être portée nue et tenue par la poignée. Et ça, c’est ouvertement une attitude belliqueuse, provocatrice ou alors milicienne. Point n’est besoin d’en faire de grands moulinets en beuglant des insanités comme "Ta mère elle est en plastique et elle fait mannequin dans les vitrines de sous-tifs" pour montrer aux autres une quelconque agressivité. Toute personne avec une lame nue à la main est sur le point de combattre. Elle doit être traitée par tous comme un ennemi déclaré de l’ordre public, de l’autorité du seigneur, de la toute puissance du guet chargé du repos de nos braves concitoyens. Sus, pas de pitié pour les Groc’. Voilà, enfin c’est ce que je crois.
Bon. Alors si je te vois encore une fois porter une lame nue, je t’extermine avec tous mes potes, même que mon grand-frère il est ceinture noire de Mikado et qu’y t’attend à la sortie quand tu veux. Sauf si t’es plusieurs, là non. Pasque alors. Mais surtout, pas de "Vas-y, je te dis en hors-jeu, j’avais pas d’sous pour m’en faire un et ma mère elle veut pô qu’j’y pique sa tringle". C’est pas digne...
Ce texte est extrait du fanzine Gros Nez - auteur : JRR Applefish
http://aufildugn.org/article.php3?id_article=11
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